Les faits saillants : Ce qu’il faut retenir de cette troisième édition

Une troisième édition qui se projette à l’échelle internationale

Les Indicateurs de bien-être au Québec peuvent être désormais comparés à ceux de onze autres juridictions, dont neuf se trouvent à l'extérieur du Canada.

Les juridictions sélectionnées pour la comparaison englobent les membres du G7 ainsi que les Well-Being Economy Governments (WEGo). Le G7, composé de sept des économies les plus avancées dans le monde, présente des structures socioéconomiques relativement comparables à celles du Québec. Les pays affiliés aux WEGo se distinguent par leur engagement gouvernemental envers le bien-être de leur population, les rendant ainsi d’excellents points de comparaison pour le Québec.

Juridictions comparées dans cette troisième édition

Juridictions
G7
 
WEGo

Les Well-Being Economy Governments (WEGo), chefs de file du bien-être

Le concept de gouvernement de l'économie du bien-être (WEGo) fait référence à un gouvernement qui donne la priorité au bien-être et à la qualité de vie plutôt qu'à la seule croissance économique. Les politiques publiques émanant de ces gouvernements visent à améliorer le bien-être général de la population, y compris des facteurs tels que la santé, l'éducation, l'équité sociale et la durabilité environnementale. L'idée est de créer une approche plus holistique et durable de la gouvernance qui va au-delà des mesures traditionnelles du PIB et des indicateurs économiques. 

Les pays du WEGo font partie d'un mouvement mondial plus large qui cherche à redéfinir les objectifs de la gouvernance et du développement économique. Ce mouvement reconnaît que la croissance économique seule ne conduit pas nécessairement à une augmentation du bien-être et que d'autres facteurs, tels que les considérations sociales et environnementales, sont tout aussi importants. Ce concept a attiré l'attention ces dernières années, alors que les sociétés sont confrontées aux défis de l'inégalité, du changement climatique et d'autres questions complexes. 

Les initiatives des pays du WEGo impliquent souvent des politiques et des pratiques innovantes pour relever ces défis et promouvoir une approche plus équilibrée et inclusive de la gouvernance.

Le Québec se compare avantageusement aux autres juridictions

Le Québec performe relativement bien par rapport aux autres juridictions, sur la base des indicateurs disponibles à la comparaison internationale. Par exemple, la longue espérance de vie à la naissance, le haut taux d’emploi des individus âgés de 25 à 54 ans, la faible disparité entre les taux d’emploi des hommes et des femmes et la part de sources renouvelables dans l’énergie consommée sont des éléments où le Québec se classe en tête de peloton international.

Malgré cette comparaison enviable, le Québec fait face à plusieurs défis

En dépit de ces résultats globaux encourageants, le Québec peut nettement mieux faire pour améliorer le bien-être de sa population. Plusieurs indicateurs cruciaux pour le bien-être des Québécoises et des Québécois ne suivent pas la trajectoire souhaitée ou n'atteignent pas le niveau d'ambition désiré. Ainsi, un bilan mitigé est observé concernant la réduction des émissions de GES par habitant, le niveau élevé d’endettement des ménages et la préoccupante détérioration de la santé mentale des Québécois et Québécoises, formant ainsi des zones d'ombre qui tempèrent les bons résultats issus de l'analyse comparative.

Toujours des indicateurs « orphelins », faute de données robustes

Malgré un inventaire complet des variables évaluant le bien-être, de nombreux indicateurs manquent toujours à l’appel pour informer de manière exhaustive les décideurs publics dans leur prise de décision. Cette troisième édition identifie seize de ces indicateurs dits « orphelins » qui, une fois chiffrés, pourraient venir bonifier la liste actuelle. La majorité de ces indicateurs orphelins, soit neuf sur seize, relèvent du pilier environnemental. Ce déficit majeur de données robustes (c’est-à-dire facilement accessibles, fiables, récurrentes dans le temps, pertinentes et comparables) limite encore à ce jour notre capacité à réaliser un diagnostic complet pour éclairer la prise de décisions.

Pourtant, certains de ces indicateurs orphelins pour le Québec, comme l’ensemble des catastrophes naturelles et des urgences, l’indice des espèces et la santé environnementale, sont d’ores et déjà quantifiés par d’autres juridictions.

Face à l’urgence que représente la crise climatique et la perte de biodiversité, l’absence de données robustes dans ce pilier doit devenir une priorité pour nos décideurs publics. Le Québec doit améliorer sa production et sa collecte de données s’il souhaite mieux comprendre les facteurs responsables de la qualité de vie de sa population, une condition préalable pour agir de manière éclairée en vue de les faire évoluer dans le bon sens. 

Les indicateurs manquant toujours à l’appel au Québec

Économie sociale

Indice entrepreneurial collectif

Qualité du système de garde à l’enfance

Itinérance

Santé environnementale

Engagement communautaire et implication bénévole

Vitalité des langues autochtones

Capacité de séquestration de carbone

Total des catastrophes naturelles et urgences

Budget et investissements en adaptation aux changements climatiques

Adaptation aux changements climatiques

Trajets de longue durée en automobile pour se rendre au travail

Part modale des modes de mobilité durable

Évolution des écosystèmes

Indice des espèces

Budget et investissements en matière de biodiversité

Note : Les indicateurs en gras sont ceux pour lesquels des données existent dans des juridictions hors Québec.

Les variations dans les tendances liées à la COVID-19, des phénomènes temporaires

L’accès à des données plus récentes pour cette troisième édition a permis de constater que certaines variations observées dans les tendances des indicateurs lors de la pandémie de COVID-19 étaient temporaires. Par exemple, des réductions dans les inégalités de revenus, une part accrue de l’énergie consommée provenant de sources renouvelables ou encore la plus faible part des Québécois et Québécoises à faible revenu, ont toutes retrouvé leurs tendances historiques pré-pandémiques.

La comparaison – Comment se compare le bien-être au Québec par rapport à celui des pays du G7 et des membres du WEGo?

Ce qu’il faut retenir de cette section – Analyse comparative

  • L'analyse permet de contraster la performance du Québec avec 11 autres juridictions, dont 9 à l’échelle internationale.

Cette section présente les résultats de l’analyse comparative des indicateurs disponibles à l’échelle internationale et identifie les indicateurs spécifiques qui tirent vers le haut ou vers le bas la performance du Québec en matière de bien-être.

Cette section ne représente pas une analyse dans le temps propre au Québec, mais bien une comparaison entre différentes juridictions, en se basant sur les premières et dernières données communes. Il convient de considérer ces résultats dans une perspective comparative plutôt que chronologique, car seuls deux points de repère sont utilisés, à savoir la première et la dernière année de données communes.

Aide à la compréhension – Première et dernière années de données communes

Le concept des premières et dernières données communes offre une base de comparaison pour analyser les différentes juridictions. Puisque les indicateurs ont des étendues de données différentes, évaluer le classement pour des années spécifiques n’était pas réalisable. Pour obtenir un classement initial et final, nous avons choisi d’utiliser les premières années et dernières années de données communes. 

Chaque indicateur a ses propres premières et dernières années communes. Par exemple, le PIB par habitant au Québec a des données disponibles de 1981 à 2022, mais les bases de données internationales couvrent la période de 1995 à 2018. Ainsi, dans ce cas, la première année de données communes retenue est 1995 tandis que la dernière est 2018. 

Les classements basés sur la première année commune intègrent le classement initial du Québec, spécifique à chaque indicateur, servant de point de départ. Les classements basés sur la dernière année commune offrent un portrait plus récent. 

En utilisant ces deux classements, il est possible de suivre l’évolution du Québec dans le temps et de le comparer à celle des autres juridictions. 

Ce choix évite également des comparaisons inappropriées entre des périodes différentes, telles qu’en comparant 2019 à 2020, cette dernière étant peu représentative des tendances historiques en raison du début de la pandémie de COVID-19.

Économie

Ce qu’il faut retenir de cette section – Économie

  • En se fiant aux indicateurs disponibles à la comparaison internationale en matière de bien-être économique, il semble que le Québec soit à la traîne par rapport aux autres juridictions.

  • Son taux d’emploi élevé chez les 25 à 54 ans et les excellents scores au test PISA sont deux indicateurs ayant particulièrement permis au Québec de se démarquer.

  • Par contre, les résultats moins favorables du Québec en ce qui concerne la productivité du travail et le revenu brut (incluant les transferts sociaux) par habitant, font partie des variables qui plombent la performance économique du Québec pour les indicateurs disponibles.

L’analyse comparative du pilier économique repose sur 13 indicateurs, par rapport aux 17 inclus dans notre tableau de bord, faute de données internationales comparables pour 3 indicateurs. 

Le pilier économique demeure toutefois le plus fourni en indicateurs, étant largement documenté par la plupart des pays en termes de performance économique. Cependant, l’absence de données pour certains indicateurs « orphelins », tels qu’une mesure de l’économie sociale ou un indice entrepreneurial collectif, souligne les opportunités d’amélioration de la production et de la collecte de données dans ce domaine. Par exemple, selon le portrait de 2016 de l'Institut de la Statistique du Québec, l’économie sociale regroupait en 2016 plus de 220 000 salariés et représentait un chiffre d'affaires de 47,8 milliards de dollars. La contribution essentielle de ce secteur devrait être mieux quantifiée.

Indicateurs faisant partie du pilier économique pour les comparaisons internationales

Revenu brut (incluant les transferts sociaux en nature) par habitant

Taux de chômage

Taux d’emploi

Produit intérieur brut (PIB) par habitant

Productivité du travail

Dépenses publiques et privées en recherche et développement 

Investissement dans des actifs non financiers

Travail à statut temporaire

Jeunes qui ne sont ni aux études, ni à l’emploi ni en formation (NEET)

Compétences des enfants et des étudiants (PISA)

Pourcentage de la population ayant un diplôme d’études secondaires 

Ratio dette brute/PIB

Endettement des ménages en proportion du revenu disponible

Le tableau suivant offre un aperçu du positionnement du Québec par indicateur, permettant de juger de ses forces et de ses faiblesses lorsque comparées aux autres juridictions. À la lumière des résultats présentés, le bilan du Québec apparaît mitigé, montrant une performance solide dans certains indicateurs tandis que d’autres révèlent des domaines de moins bonne performance.

Positionnement du Québec pour la dernière donnée commune disponible par indicateur

Indicateur

Positionnement du Québec

Revenu brut incluant les transferts sociaux en nature par habitant

11e sur 11

Taux de chômage

7e sur 12

Taux d’emploi

1er sur 12

PIB par habitant

12e sur 12

Productivité du travail

11e sur 12

Dépenses publiques et privées en recherche et développement

7e sur 12

Investissement dans des actifs non financiers

10e sur 10

Travail à statut temporaire

5e sur 11

Jeunes qui ne sont ni aux études, ni à l’emploi et ni en formation (NEET)

2e sur 11

Compétences des élèves (PISA)

4e sur 12

Pourcentage de la population détenant ayant un diplôme d’études secondaires

7e sur 11

Ratio dette brute/PIB

2e sur 12

Endettement des ménages en proportion du revenu disponible

7e sur 11

Un indicateur significatif permettant au Québec de se démarquer est indéniablement le taux d’emploi des individus âgés de 25 à 54 ans. Sur cet indicateur, le Québec occupe la 1ère place parmi les 12 juridictions étudiées, avec une proportion de 87 % de sa population âgée entre 25 et 54 ans employée. En observant le graphique ci-dessous, on constate que le Québec, qui se situait en milieu de peloton il y a une décennie, a connu une importante croissance de son taux d’emploi, lui permettant de s’emparer du premier rang en 2022.

Les compétences des élèves représentent un autre indicateur économique permettant au Québec de se démarquer des onze autres juridictions étudiées. Ces compétences sont évaluées à l’aide des scores PISA, un test standardisé développé par l’OCDE et utilisé dans de nombreux pays à travers le monde pour tester les capacités des étudiants de 15 ans. Le PISA comporte trois volets, soit la lecture, les mathématiques et les sciences. 

Dans ces disciplines, le Québec se classe respectivement 5ème, 2ème et 4ème, ce qui lui permet d’atteindre le 4ème rang global sur 12 juridictions. Les bonnes performances des adolescents québécois pourraient découler de nombreux facteurs, notamment d’une qualité de l’enseignement globalement meilleure ou une meilleure familiarisation des étudiants québécois aux tests standardisés.

Classements au test PISA pour l’année 2022

Classement global

Lecture

Mathématiques

Sciences

1

Japon

Japon

Japon

Japon

2

Ontario

Ontario

Québec

Ontario

3

Canada

Canada

Canada

Canada

4

Québec

États-Unis

Ontario

Québec

5

Finlande

Québec

Royaume-Uni

Finlande

6

Nouvelle-Zélande

Nouvelle-Zélande

Finlande

Nouvelle-Zélande

7

Royaume-Uni

Royaume-Uni

Nouvelle-Zélande

Royaume-Uni

8

États-Unis

Finlande

Allemagne

États-Unis

9

Allemagne

Italie

France

Allemagne

10

Italie

Allemagne

Italie

Italie

11

France

France

États-Unis

France

12

Islande

Islande

Islande

Islande

La croissance endémique de la productivité du travail au Québec est solidement documentée, mais sa performance à l'échelle internationale est loin d'être satisfaisante, puisque le Québec en avant-dernière position sur les 12 juridictions étudiées. Cet aspect revêt une importance cruciale et nécessite une analyse approfondie, étant un indicateur économique déterminant. Alors que le rattrapage au niveau de l'emploi est déjà réalisé depuis un certain temps et que le processus de vieillissement de la population québécoise est en voie d’atteindre un sommet, la productivité devient le seul levier sur lequel le gouvernement du Québec peut compter pour stimuler la croissance économique et ainsi résorber le retard significatif accumulé au cours des dernières décennies.

Un autre élément nécessitant de l’amélioration dans le domaine économique du Québec est le revenu brut par habitant. Le Québec se classe à la dernière position, occupant le 11ème rang parmi les 11 juridictions étudiées pour lesquelles des données sont disponibles. Malgré une croissance régulière du revenu brut par habitant depuis 2008, les données indiquent que le Québec maintient un écart constant par rapport aux autres juridictions. Bien que le gouvernement du Québec ait clairement défini dans ses documents budgétaires l'objectif prioritaire de réduire l'écart de richesse avec l'Ontario, les données suggèrent que cet écart persiste par rapport à l'ensemble des autres juridictions.

Société

Ce qu’il faut retenir de cette section – Société

  • En se fiant aux indicateurs disponibles à la comparaison internationale, il semble que le Québec performe dans la moyenne en termes de bien-être social.

  • L’espérance de vie relativement longue et une faible disparité entre les taux d’emploi des hommes et des femmes sont des indicateurs permettant de se distinguer des autres juridictions étudiées.

  • À l’inverse, la faible proportion d’emplois dans le secteur culturel et un écart salarial entre les hommes et les femmes plus marqué que dans les juridictions à l’étude représentent des indicateurs pour lesquels le Québec est loin de faire bonne figure lorsque comparé aux autres juridictions.

Au sein du pilier sociétal, la comparaison inter-juridictions est effectuée à partir de 8 indicateurs parmi les 22 qui composent ce pilier du tableau de bord. Cette maigre proportion d’indicateurs comparables peut être expliquée par une grande disparité dans la publication des données sociales d’une juridiction à l’autre.

Indicateurs faisant partie du pilier sociétal pour comparaison internationale

Espérance de vie à la naissance

Coefficient de Gini

Indice de Palma

Intégration économique des immigrants

Écart du taux d’emploi entre les hommes et les femmes

Écart salarial entre les hommes et les femmes

Ménages ayant accès à internet

Emplois dans le domaine culturel

Le tableau suivant répertorie la performance du Québec au niveau sociétal lorsque comparé aux juridictions choisies, et ce, pour les indicateurs permettant une telle comparaison. À la différence du pilier économique où le Québec se place en tête pour certains indicateurs tout en se situant en bas du classement pour d’autres, sa performance oscille davantage autour de la moyenne.

Positionnement du Québec pour la dernière donnée commune disponible par indicateur

Indicateur

Positionnement du Québec

Espérance de vie à la naissance

3e sur 12

Coefficient de Gini

3e sur 12

Indice de Palma

3e sur 12

Intégration économique des immigrants

7e sur 11

Écart du taux d’emploi entre les hommes et les femmes

2e sur 12

Écart salarial entre les hommes et les femmes

7e sur 12

Ménages ayant accès à Internet

7e sur 10

Emplois dans le domaine culturel

8e sur 10

Un indicateur sociétal pour lequel le Québec se distingue avantageusement est l’écart du taux d’emploi entre les hommes et les femmes. En 2021, le Québec se classe en 2ème position derrière la Finlande, avec un écart de 4,2 %. Comparativement, la Finlande affiche un écart de 1,9 %, soit plus de deux fois inférieur à celui du Québec observé pour la même année. Toutefois, parmi les juridictions étudiées, des écarts atteignant jusqu’à 17,7 % sont observés, mettant en relief la performance somme toute remarquable du Québec dans ce domaine.

Un indicateur distinct qui permet au Québec de se démarquer sur le plan sociétal est l’espérance de vie à la naissance. En 2020, le Québec décroche la 3ème espérance de vie la plus élevée, derrière le Japon et l’Islande, avec une moyenne de 82,6 ans. Le Japon, réputé pour sa population vieillissante, détient une espérance de vie de 84,6 ans. À titre de comparaison, les États-Unis se distinguent par une espérance de vie relativement faible par rapport aux juridictions présentées, avec un écart croissant depuis les années 1990.

La proportion des emplois dans le domaine culturel est toutefois un indicateur qui ternit la performance du Québec pour le pilier sociétal.  Sur cet indicateur, le Québec occupe la 7ème place parmi 10 juridictions étudiées. En 2019, seulement 3,6 % des emplois étaient attribués au domaine culturel au Québec, contre 5,5 % dans la juridiction en tête, soit l’Islande.

Un autre indicateur qui impacte négativement la position du Québec est l’écart salarial entre les hommes et les femmes. Le Québec se classe 7ème sur 12 juridictions pour cet indicateur, avec un écart salarial de 14,7 % en 2021. En tête de ce classement, l’Italie affiche un écart salarial entre les hommes et les femmes de seulement 5,7 %.

Environnement

Ce qu’il faut retenir de cette section – Environnement

  • Le Québec, pour les 8 indicateurs disponibles pour comparaison internationale, performe relativement bien comparé aux juridictions à l’étude.

  • Les indicateurs qui ont contribué à cette performance notable sont la bonne qualité de l’air et l’importante proportion d’énergie consommée provenant de sources renouvelables. 

  • Au contraire, la faible productivité énergétique et la superficie limitée des aires protégées sont des facteurs qui pourraient être améliorés.

  • Le portrait du bien-être environnemental du Québec comparé aux autres juridictions restera incomplet tant que des données robustes ne seront pas disponibles pour les indicateurs dits « orphelins » de ce pilier.

Seuls 8 indicateurs parmi les 16 comptabilisés dans le pilier environnemental ont pu faire l'objet d'une comparaison internationale. Il est à noter qu’une comparaison beaucoup plus exhaustive pourrait être effectuée si le Québec documentait des données robustes à l’égard des neuf indicateurs « orphelins » associés au pilier environnemental, tels qu’en matière d’adaptation aux changements climatiques ou d’évolution de la biodiversité.

Indicateurs faisant partie du pilier environnemental pour comparaison internationale

Qualité de l’air

Émissions de gaz à effet de serre (GES)

Émissions de gaz à effet de serre (GES) par habitant

Aires protégées

Nombre de ménages raccordés à un centre d’assainissement d’eau

Part de sources renouvelables dans l’énergie consommée

Productivité énergétique

Artificialisation des sols

Note : Habituellement, les émissions de GES et les émissions de GES par habitant ne comptent pour qu’un seul indicateur. Pour cet exercice, nous les avons séparé, puisque leurs tendances respectives sont très différentes.

Le tableau suivant met en lumière les forces et les faiblesses du Québec selon l’analyse comparative. La plupart des indicateurs révèlent que le Québec se positionne généralement dans la première moitié du peloton.

Positionnement du Québec pour la dernière donnée commune disponible par indicateur

Indicateur

Positionnement du Québec

Qualité de l’air

2e sur 12

Émissions de GES

3e sur 12

Émissions de GES par habitant

5e sur 12

Aires protégées

5e sur 11

Nombre de ménages raccordés à un centre d’assainissement d’eau

4e sur 11

Part de sources renouvelables dans l’énergie consommée

2e sur 12

Productivité énergétique

9e sur 12

Artificialisation des sols

3e sur 12

Un indicateur pour lequel le Québec se positionne très avantageusement sur le plan environnemental est la part de sources renouvelables dans sa consommation énergétique, dû à un choix historique de se tourner vers l’hydroélectricité. En effet, le Québec décroche la 2ème position pour cet indicateur, avec 51,2 % de son énergie consommée provenant de sources renouvelables. Cependant, l’Islande prend de loin la tête du classement avec une part de 82,8 %. Bien que le Québec soit un très grand producteur et consommateur d’hydroélectricité, les énergies fossiles continuent de représenter d’importantes sources d’énergie pour la propulsion des véhicules, les procédés industriels et le chauffage des bâtiments. Afin d’améliorer son positionnement pour cet indicateur particulier, le Québec doit se distancer de sa dépendance aux énergies fossiles, notamment aux fins de transport, pour les véhicules des particuliers tout comme le transport lourd, et de production industrielle.

Un autre indicateur qui contribue positivement à la performance du Québec en ce qui a trait au bien-être environnemental est son excellente qualité de l’air en 2017, déterminée par le nombre de tonnes de polluants atmosphériques par kilomètre carré. 

Cependant, l’importante saison de feux de forêts connue durant l’été 2023 et celles qui fort probablement suivront, causées par la détérioration continue de la situation climatique, pourraient affecter le bon positionnement du Québec pour cet indicateur à moyen terme.

Certains indicateurs handicapent toutefois la performance du Québec au niveau environnemental, notamment la productivité énergétique. La productivité énergétique mesure l'efficacité avec laquelle l'énergie est utilisée pour produire des biens et des services. Ainsi, une productivité énergétique plus élevée signifie qu’une juridiction est capable de produire davantage avec moins d’énergie. 

Pour cet indicateur, le Québec se positionne en 9ème place sur 12 juridictions étudiées, avec une production de 203 $ par gigajoule d’énergie utilisée en 2015-2016. L’accès facile à une électricité provenant de sources renouvelables à faible coût peut partiellement expliquer cette faiblesse. 

En comparaison, le Royaume-Uni affiche la meilleure productivité énergétique pour l’année 2015-2016, avec une production de 474 $ par gigajoule d’énergie consommée, soit plus du double de celle du Québec. 

Les pays européens surpassent généralement les juridictions nord-américaines étudiées pour cet indicateur, en raison, notamment, de prix de l’énergie nettement plus élevés, les contraignant à optimiser leur efficacité énergétique.

Un indicateur pour lequel la performance du Québec laisse à désirer est la superficie d’aires protégées. Le Québec se place en 5ème position sur 11 juridictions, avec seulement 16,3 % de son territoire considéré comme protégé en 2022. Le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France et la Nouvelle-Zélande font tous significativement mieux que le Québec, avec des proportions d’aires protégées oscillant entre 30 % et 40 % en 2022. Rappelons que depuis 2021, le gouvernement du Québec s’est engagé à protéger 30 % de son territoire d’ici 2030 ; une cible réaffirmée lors de l’adoption de l’Accord de Kunming-Montréal en 2022. Le développement des aires protégées dans le sud du Québec représente ainsi une avenue potentielle d’amélioration afin que le Québec rehausse davantage son positionnement environnemental.

L'évolution – Comment évolue le bien-être au Québec?

Ce qu’il faut retenir de cette section

  • L’évolution des indicateurs de bien-être au Québec révèle une nette amélioration des piliers économique et sociétal, notamment grâce à une meilleure qualité de l’emploi et une baisse de l’indice de gravité de la criminalité.

  • Cependant, des préoccupations subsistent en ce qui concerne la santé mentale des Québécois et Québécoises, ainsi que la situation liée à l’endettement des ménages.

  • En revanche, les constats relatifs au pilier environnemental soulignent que peu d’indicateurs ont connu des améliorations notables, laissant un important chemin à parcourir pour atteindre les cibles climatiques. 

  • Enfin, l’absence de données pour les 16 indicateurs orphelins limite la capacité à dresser un portrait complet du bien-être au Québec.

La section précédente a évalué la performance du Québec par rapport à d’autres juridictions pour la dernière année de données communes. La présente section se concentre sur l’identification des indicateurs clés qui ont soutenu cette amélioration du bien-être des Québécois et Québécoises au fil du temps. Nous examinons les indicateurs qui n’ont pas connu de changements significatifs depuis 10 ans, mais qui sont susceptibles de s’améliorer à l’avenir.

Économie

Ce qu’il faut retenir de cette section – Économie

  • Le bien-être économique du Québec a considérablement progressé au cours de la période étudiée, s’étendant approximativement de 1976 à 2022. 

  • En effet, plus de 70 % des indicateurs ont connu une nette amélioration. 

  • Cette avancée a été alimentée en partie par une réduction de la proportion de jeunes de 15 à 29 ans qui ne sont ni aux études, ni en emploi et ni en formation, ainsi que par une amélioration de la qualité de l’emploi. 

  • Toutefois, l’endettement élevé des ménages demeure toutefois une préoccupation majeure.

Le bien-être économique du Québec a connu une amélioration importante au fil du temps, avec plus de 70 % de ses indicateurs enregistrant des progrès sur l’ensemble de leur période disponible, couvrant principalement de 1976 à 2022. Au cours de la dernière décennie, la tendance positive s’est renforcée, avec des indicateurs qui, auparavant, stagnaient, et s’améliorent désormais.

Seul un indicateur a connu une détérioration sur la période étudiée, soit l’important endettement des ménages.

Cette section permettra d’identifier les indicateurs qui ont contribué à cette amélioration, ainsi que ceux qui réclament des progrès. À noter que l’absence de 2 indicateurs orphelins, soit l’économie sociale et l’indice entrepreneurial collectif, empêche de dresser un portrait complet du bien-être économique du Québec.

Tableau synthèse du pilier économique

Amélioration

Stagnation

Détérioration

Donnée unique

Ensemble de la période

12

4

1

0

10 dernières années

13

3

1

0

Note : « Ensemble de la période » fait référence à l’étendue des données disponibles propre à chaque indicateur

La proportion des jeunes de 15 à 29 ans qui ne sont ni aux études, ni à l’emploi et ni en formation (NEET) est un indicateur économique ayant considérablement contribué à l’amélioration du bien-être économique des Québécoises et Québécois. Cet indicateur, en général, reflète la part des adolescents et des jeunes adultes sans occupation concrète. Un NEET élevé signale potentiellement une situation préoccupante liée au marché du travail, tel qu’un taux de chômage élevé chez les jeunes, ou à une promotion insuffisante de l’éducation, entraînant des taux élevés de décrochage scolaire.

Le NEET a joué un rôle clé dans l’amélioration de l’économie québécoise, passant d’environ 25 % à la fin des années soixante-dix et au début des années 1980 à 7,5 % en 2022. Le taux élevé observé initialement peut être attribué au taux de chômage élevé parmi les jeunes baby-boomers entrant massivement sur le marché du travail. Cependant, le phénomène s’est résorbé au fil des années. La proportion de jeunes poursuivant des études universitaires a également augmenté au fil du temps, réduisant le NEET, qui est maintenant trois fois inférieur à ce qu’il était en début de période étudiée.

La qualité de l’emploi émerge comme un autre indicateur économique ayant joué un rôle crucial dans l’amélioration du bien-être au Québec au fil du temps. Cet indicateur mesure la proportion d’emplois en fonction de leur qualité, prenant en compte la rémunération, les heures travaillées, les qualifications requises, et la présence éventuelle de travailleurs surqualifiés. 

Depuis la fin des années 1990, le Québec a connu une augmentation de 20 points de pourcentage dans la part d’emplois de forte qualité, marquant un progrès significatif pour son économie. La part d’emplois de forte qualité a plus que doublé au cours des 25 dernières années, tandis que les emplois de faible qualité, prédominants en 1997, ont été réduits de moitié.

Cette transition vers une économie caractérisée par une plus grande prédominance d’emplois de forte qualité a le potentiel d’attirer des travailleurs qualifiés et d’offrir des opportunités professionnelles plus enrichissantes sur le marché du travail.

Cependant, tous les indicateurs économiques n’ont pas enregistré d’amélioration. Certains, au contraire, se sont détériorés. 

Un exemple notable est celui du ratio d’endettement des ménages par rapport au revenu disponible. Bien que cet indicateur ait globalement diminué depuis 2010, le niveau d’endettement des ménages demeure une source de préoccupation. En 2022, pour chaque 100 $ de revenu disponible (c’est-à-dire le revenu après impôts et transferts gouvernementaux), les ménages québécois étaient endettés à hauteur de 145 $. 

Cela implique que le ménage moyen au Québec devrait consacrer près d’un an et demi de revenu disponible pour rembourser l’intégralité de ses dettes, sans prendre en compte d’autres dépenses. 

La récente augmentation du niveau d’endettement des ménages québécois entre 2020 et 2021 suscite beaucoup d’inquiétudes, notamment de la part de la Banque du Canada, surtout avec les importantes périodes d’inflation en 2022 et 2023, ainsi que les hausses substantielles des taux d’intérêt. Les coûts croissants de l'alimentation et du logement exercent une pression financière sur les ménages québécois. La hausse constante des loyers pourrait être partiellement expliquée par un taux d'inoccupation très bas des logements.

Par conséquent, les ménages québécois pourraient faire face à des dépenses plus élevées pour subvenir à leurs besoins, en plus de voir leurs paiements réguliers, notamment les hypothèques, augmenter de manière significative en raison des taux d’intérêt actuellement élevés.

Société

Ce qu’il faut retenir de cette section – Société

  • Le Québec a connu une amélioration significative de son bien-être sociétal, avec 60 % des indicateurs ayant enregistré des progrès notables. 

  • Cette amélioration est encore plus marquée au cours des dix dernières années. 

  • Les facteurs explicatifs de cette progression incluent une hausse de l’espérance de vie, une diminution de l’indice de la criminalité et une hausse du taux d’emploi des Autochtones. 

  • En revanche, la santé mentale des Québécoises et Québécois s’est grandement détériorée.

  • Il manque toutefois plusieurs indicateurs clés pour brosser un bilan exhaustif.

Le pilier sociétal, tout comme le pilier économique, a enregistré un net progrès, avec une amélioration de près de 60 % de ses indicateurs. Cette proportion augmente à 68% si l’on considère les tendances des dix dernières années. 

En particulier, deux indicateurs qui affichaient une certaine stagnation sur l’ensemble de la période ont enregistré des améliorations notables au cours de la dernière décennie.

En revanche, des lacunes persistent, notamment l’absence de données robustes pour de nombreux indicateurs orphelins, tels que la qualité du système de garde à l’enfance et les statistiques sur l’itinérance.

Tableau synthèse du pilier sociétal

Amélioration

Stagnation

Détérioration

Donnée unique

Ensemble de la période

13

2

4

3

10 dernières années

15

0

4

3

Le pilier sociétal a joué un rôle significatif dans l’accroissement du bien-être des Québécoises et des Québécois. 

Un indicateur majeur ayant contribué à cette amélioration est l’indice de la gravité de la criminalité, mesurant la gravité de toutes les infractions au Code criminel commises au Québec. Un indice bas reflète des crimes de gravité moindre, traduisant ainsi une société plus sécuritaire. L’indice, basé sur la gravité des crimes en 2006 au Canada, est normalisé à une base de 100 pour cette année-là.

Une valeur inférieure à 100 indique une diminution de la gravité de la criminalité par rapport à l’ensemble du Canada en 2006. 

Cet indice a énormément contribué à l’amélioration du bien-être des Québécoises et des Québécois, chutant de près de moitié au cours des 25 dernières années. Cette baisse marque une nette amélioration de la sécurité des gens, renforçant ainsi leur bien-être. Cependant, il est important de noter une légère augmentation de l’indice en 2021 et 2022. Une société plus égalitaire, des jeunes ayant davantage d’opportunités à travers un meilleur système d’éducation ou des emplois de meilleure qualité sont des facteurs qui pourraient expliquer en partie une réduction de la criminalité au Québec.

L’espérance de vie à la naissance constitue un autre indicateur sociétal ayant contribué à l’amélioration du bien-être au Québec. Cet indicateur offre des perspectives sur la qualité de vie au sein d’une société. En effet, une espérance de vie croissante peut refléter un système de santé plus performant, un meilleur accès aux besoins essentiels tels que l’eau potable et la nourriture, ainsi qu’un environnement favorable à la longévité, comme une meilleure qualité de l’air. 

Depuis 40 ans, l’espérance de vie au Québec a augmenté de près de 8 années, témoignant d’une croissance marquée du bien-être des Québécoises et Québécois. Cependant, une légère diminution a été perçue depuis la pandémie de COVID-19. Il importe de demeurer vigilant et de s’assurer d’un retour vers une évolution positive.

L’emploi des Autochtones constitue une autre dynamique sociétale distincte au Québec. Le taux d’emploi des Autochtones âgés de 15 à 64 ans au Québec offre un éclairage précieux sur leur intégration dans le marché du travail. Malgré quelques fluctuations, ce taux d’emploi affiche une tendance croissante marquée, soit une hausse de près de 16 points de pourcentage entre 2007 et 2022. Ceci équivaut à une croissance moyenne d’environ un point de pourcentage par an. Cette progression représente ainsi un vecteur ayant contribué à l’amélioration du bien-être des Québécoises et des Québécois au cours des 15 dernières années.

Cependant, plusieurs indicateurs récents témoignent d’une détérioration du pilier sociétal au Québec.

L’un des signaux préoccupants est la santé mentale, mesurée par la proportion de la population percevant sa santé mentale comme étant « très bonne ou excellente ». Cette évaluation a connu une baisse constante au fil des années. 

Entre 2015 et 2021, la part des Québécois considérant leur santé mentale comme très bonne ou excellente a chuté de près de 10 points de pourcentage, soit une baisse de près de 2 points de pourcentage par an, phénomène ayant été accentué par la pandémie. Des facteurs tels qu’un accès difficile aux ressources en santé mentale, l’isolement pendant la pandémie et le stress financier ont contribué à cette détérioration. Une intervention immédiate s’impose pour inverser cette tendance préoccupante.

Environnement

Ce qu’il faut retenir de cette section – Environnement 

  • Le bilan du pilier environnemental est mitigé. 

  • Bien que certains indicateurs aient enregistré des améliorations, des lacunes importantes persistent dans l’atteinte de nos objectifs climatiques. 

  • Près d’un quart des indicateurs montrent des détériorations, dessinant un tableau plutôt sombre. 

  • Malgré une amélioration marquée de la superficie protégée au Québec, demeurant toutefois nettement inférieure à celle des juridictions comparées, des émissions de gaz à effet de serre (GES) par individu toujours beaucoup trop élevées et une croissance continue et disproportionnée du parc automobile par rapport à la population suscitent des préoccupations majeures pour le bien-être environnemental au Québec. 

  • L’absence de données robustes pour une dizaine d’indicateurs dans ce pilier, en particulier en matière d’adaptation aux changements climatiques et de biodiversité, limite la capacité à fournir une analyse exhaustive du bien-être environnemental au Québec et d’offrir aux décideurs publics l’ensemble des informations nécessaires à la prise de décision éclairée.

Le bilan du pilier environnemental présente une certaine ambivalence. En effet, 35 % des indicateurs ont enregistré des améliorations, tant sur l’ensemble de la période que durant la dernière décennie. 

Malgré ces progrès, l’écart à combler pour atteindre nos cibles climatiques demeure substantiel. De plus, un quart des indicateurs ont enregistré des détériorations notables. 

Il est essentiel de noter que neuf indicateurs orphelins manquent toujours à l’appel pour ce pilier, ne permettant de faire qu’une analyse partielle de la situation environnementale au Québec et limitant grandement notre capacité à agir de manière éclairée en la matière.

Tableau synthèse du pilier environnemental

Amélioration

Stagnation

Détérioration

Donnée unique

Ensemble de la période

6

4

4

3

10 dernières années

6

4

4

3

Note : Les émissions de GES totales et par habitant ont été considérés comme deux indicateurs distincts dans cette analyse, d’où le total de seize indicateurs environnementaux dans le tableau ci-haut.

Les aires protégées sont un des indicateurs environnementaux ayant contribué à l’accroissement du bien-être au Québec. L’indicateur des aires protégées mesure la superficie protégée du territoire québécois, prenant en compte la protection de la faune, de la flore, des ressources naturelles et de la culture.

Bien que cet indicateur dresse un bilan mitigé, le Québec se situant au milieu du peloton international, son évolution depuis le début des années 2000 a néanmoins joué un rôle significatif dans l’amélioration du bien-être environnemental au Québec, enregistrant une croissance substantielle depuis 2002. En effet, le pourcentage de la superficie protégée est passée de 2,9% en 2002 à 16,3% en 2022. Une grande partie de cette amélioration s’est produite au cours des deux dernières années, où la superficie a augmenté de plus de six points de pourcentage depuis 2020. 

Ce résultat demeure insuffisant par rapport aux performances enregistrées par les pays en tête de classement. Le Québec doit s’efforcer de protéger davantage le sud de son territoire, où réside la grande majorité de la population et où sont situés les grands centres urbains.

Malgré des progrès enregistrés pour certains indicateurs environnementaux, notamment la réduction des émissions de GES, cette amélioration demeure bien en deçà des cibles fixées par le gouvernement. Rappelons que le gouvernement du Québec s'est engagé à réduire ses émissions de GES de 37,5 % d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990 et à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. 

Un exemple flagrant de cette amélioration timide réside dans la variation des émissions de GES par habitant. Avec une moyenne de près de 10 tonnes par habitant, le Québec demeure considérablement éloigné du niveau d’émissions compatible avec la limitation du réchauffement planétaire à 1,5ºC, c’est-à-dire à 2 tonnes par personne par an. Bien que ses émissions aient diminué de 3 tonnes par personne depuis les années 1990, le Québec doit encore diviser par 5 ses émissions de GES par habitant s’il souhaite atteindre sa cible.

Les raisons de cette progression lente résident notamment dans une forte consommation d’électricité possible par un accès facile et des tarifs bas, ainsi que des prix et des taxes sur l’essence nettement inférieurs à ceux observés dans le reste du monde. Ces facteurs ralentissent les avancées nécessaires à la réduction des émissions de GES par personne. 

Le nombre croissant de véhicules circulant sur les routes québécoises constitue un autre indicateur de détérioration environnementale ayant des implications sur le bien-être au Québec. 

Représenté par le ratio de véhicules par personne, cet indicateur révèle que le Québec compte désormais plus de véhicules que de résidants sur son territoire. En 1999, ce ratio s’établissait à 0,84 véhicule par personne, alors qu’en 2019, il a grimpé à 1,05 véhicule par personne, incluant les individus ne conduisant pas, tels que les enfants. Notons que les données présentées regroupent également les véhicules lourds et les véhicules de fonction. Cette augmentation suggère une expansion disproportionnée du parc automobile au Québec. 

La présence accrue de véhicules sur nos routes se traduit par davantage d’émissions de GES. Ce phénomène est accéléré par la popularité croissante des véhicules plus polluants comme les véhicules utilitaires sports (VUS) comme souligné par la synthèse d'Équiterre (2021).

Outre les conséquences environnementales importantes, cette expansion du parc automobile entraîne des répercussions de nature économique et sociétale, telles que la congestion routière, des enjeux de sécurité routière et la hausse des coûts d’entretien des infrastructures routières.

Conclusion

Cette nouvelle édition des Indicateurs du Bien-Être au Québec permet d’ajouter un axe comparatif en comparant le Québec à 11 autres juridictions faisant partie du G7 ou des WEGo. Le Québec se positionne bien relativement à ces pays en matière de compétences des adolescents à travers les scores PISA, avec son espérance de vie et sa part d’énergie consommée provenant de sources renouvelables. Cependant, le Québec fait moins bien que ces juridictions dans des enjeux comme le revenu brut incluant les transferts sociaux en nature par habitant, la part des emplois dans le domaine culturel ou encore la productivité énergétique.

Lorsqu’on fait un « zoom » sur le Québec, on remarque que ce dernier reste éloigné de ses propres cibles de réduction des GES et encore plus loin d’une empreinte carbone compatible avec un réchauffement planétaire limité à 1,5ºC.

Des améliorations sont également nécessaires dans plusieurs domaines, notamment le revenu brut par habitant, la productivité du travail, la part des emplois dans le domaine culturel, l'écart salarial entre les hommes et les femmes, et la croissance de la productivité énergétique. 

Certains points positifs méritent d’être soulignés, comme les performances élevées des enfants et étudiants au test PISA, un faible écart du taux d’emploi entre les hommes et les femmes ou encore l’espérance de vie à la naissance. 

Notre démarche souligne l'importance de chiffrer les indicateurs orphelins, principalement dans les piliers social et environnemental, pour obtenir une vision plus exhaustive du bien-être au Québec. Le portrait dressé par notre exercice du bien-être au Québec demeure partiel, avec 16 indicateurs considérés comme « orphelins », signifiant qu’aucune donnée robuste n’est actuellement disponible pour le Québec pour ces indicateurs, contrairement à d’autres juridictions qui quantifient certains d’entre eux. Par exemple, plusieurs pays européens, comme la France, les pays scandinaves et l’Allemagne, disposent d’indicateurs facilement accessibles et récurrents sur la santé environnementale ou l’indice des espèces. Ainsi, le Québec doit rendre disponibles ces indicateurs orphelins pour mieux comprendre les multiples facteurs qui affectent le bien-être des Québécoises et des Québécois, et intégrer ces connaissances dans le processus décisionnel. Cela contribuera à éclairer les politiques et les actions en faveur du bien-être, en particulier dans les domaines sociaux et environnementaux où la précision des données est essentielle pour orienter efficacement les initiatives et les réformes. 

À ce chapitre, l’exemple de la Nouvelle-Zélande pourrait servir d’inspiration au Québec, pays qui depuis 2019 guide ses politiques et ses investissements au moyen d’un cadre de niveau de vie (The Living Standard Framework), un tableau de bord d’indicateurs du bien-être (The Living Standards Framework Dashboard), un budget annuel du bien-être (The Wellbeing budget) ainsi qu’un rapport rétrospectif sur l’état du bien-être (Te Tai Waiora: Wellbeing in Aotearoa New Zealand).

Plus globalement, l’approche prônée par les Indicateurs du bien-être au Québec contribue à l'enrichissement de la recherche en sciences économiques dédiée au bien-être des populations. Ces travaux ont souvent cherché à élaborer des indicateurs synthétiques de bien-être plus pertinents que le PIB, ainsi que des tableaux de bord visant à appréhender le progrès économique, le bien-être humain et l’harmonie avec la nature dans toute leur diversité.

Cette recherche expose les leçons fondamentales que l'on peut tirer d'une comparaison entre le Québec et plusieurs pays de niveau de développement similaire, s’inscrivant dans le contexte des observations formulées par la commission Stiglitz sur les limitations de se baser exclusivement sur le PIB pour évaluer le bien-être d’un pays.

L'utilisation d'indicateurs de conditions de vie, tels que ceux présentés dans cet exercice, met en lumière des distinctions nettement plus marquées dans les domaines tels que la santé, l'éducation, les risques de chômage et de pauvreté, la sécurité ainsi que l’environnement. Cette approche offre ainsi une évaluation plus holistique du progrès, transcendant la simple mesure économique pour englober la complexité des aspects qui influent sur le bien-être des individus et des communautés.

Méthodologie et limites de l’exercice

Collecte de données et méthodologie de l’analyse comparative

La troisième édition des Indicateurs du bien-être au Québec a introduit 9 juridictions supplémentaires pour élargir la comparaison du bien-être au Québec au-delà des frontières canadiennes, nécessitant des efforts substantiels pour trouver des données comparables à celles présentées pour le Québec. 

Un processus de collecte de données a été entrepris dans trois grandes bases de données internationales : l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque mondiale. 

À la suite de cette étape, une recherche approfondie a été menée dans les bases de données nationales de chaque juridiction étudiée, telles que l’Office of National Statistics (ONS) pour le Royaume-Uni ou encore l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) pour la France.

Cependant, des divergences entre les données provenant des bases de données internationales et celles de de Statistique Canada ont parfois été constatées. Ces écarts ont nécessité des ajustements méthodologiques, appliqués tant aux données des trois juridictions préexistantes (Québec, Ontario et Canada) qu’à celles issues des bases de données internationales. Les ajustements méthodologiques, tels que le changement du groupe d’âge étudié, la conversion des devises étrangères en dollars canadiens ou le recours à une variable « proxy » différente pour représenter l’indicateur, sont spécifiés directement sur la page des indicateurs individuels ayant nécessité ces modifications. 

Pour garantir l’homogénéité des données présentées, des comparaisons ont été effectuées entre les données issues des bases de données internationales et celles de Statistique Canada. Le Canada, figurant à la fois dans les bases de données de l’OCDE, du FMI et de la Banque mondiale, ainsi que dans les données de Statistique Canada, a servi de « témoin », assurant la possibilité et l’acceptabilité des comparaisons entre les différentes données.

L’analyse comparative a été effectuée pour chaque indicateur disponible, en utilisant la dernière année de données communes entre les juridictions. 

Pour les indicateurs orphelins, nous avons effectué une recherche poussée de données robustes (facilement accessibles, fiables, récurrentes dans le temps, pertinentes et comparables) à partir de bases de données canadiennes et internationales pour combler les lacunes des deux premières éditions. Nous avons ainsi pu documenter quatre nouveaux indicateurs portant sur la santé environnementale, les catastrophes naturelles, l’indice des espèces et l’artificialisation des sols. Notons cependant que pour les trois premiers indicateurs mentionnés, aucune information n’était disponible pour le Québec. Nous avons aussi consulté l’avis d’experts sur ces thématiques pour obtenir les informations qui nous manquaient.

Méthodologie – Analyse temporelle

Cette troisième édition des Indicateurs de bien-être au Québec a actualisé l’ensemble des données présentées lors de la deuxième édition pour les trois juridictions initiales de l’exercice : le Québec, l’Ontario et le Canada. Les données les plus récentes ont été intégrées aux séries chronologiques existantes. L’analyse temporelle qui en résulte permet d’identifier les tendances générales émergeant de données remontant parfois au milieu des années 1970 et allant parfois jusqu’en 2022. 

Afin d’évaluer les grandes tendances des trois piliers, toutes les données disponibles pour chaque indicateur ont été analysées. Les tendances reflètent la progression des différents indicateurs dans le temps pour le Québec. Plusieurs facteurs influent sur l’analyse de la progression d’un indicateur, tels que l’étendue des données disponibles, la variation sur l’ensemble de la période, le taux de croissance annuel moyen ainsi que le jugement contextuel. La combinaison de tous ces facteurs permet de déterminer si un indicateur s’est amélioré, détérioré ou est demeuré inchangé dans le temps. 

Ce processus, spécifique à chaque indicateur, a été réalisé pour les 55 indicateurs chiffrés permettant une analyse approfondie pour le Québec. Il est donc impossible d’établir des barèmes chiffrés parfaitement homogènes pour déterminer si un indicateur s’est amélioré, détérioré ou est resté inchangé, car les conditions d’analyse varient d’un indicateur à l’autre. Cette approche pragmatique a été adoptée pour inclure tous les indicateurs dans l’analyse, évitant l’exclusion de plusieurs indicateurs pour lesquels aucune donnée n’existait pour la période choisie, en raison d’une uniformisation forcée de la période d’analyse.

Limites de l’exercice

Bien que l’analyse des tendances globales offre un aperçu de l’état du bien-être au Québec, il est important de prendre en compte certaines limites lors de l’interprétation des résultats.

Premièrement, la taille limitée de l’échantillon pour certaines données temporelles explique la présence d’indicateurs avec un échantillon restreint ou des lacunes de données. Ce déficit de données entrave une analyse exhaustive du bien-être, en particulier dans les domaines social et environnemental.

Deuxièmement, l’analyse des tendances globales n’est pas basée sur un échantillon fixe, car l’objectif est d’inclure le plus grand nombre possible d’indicateurs. Opter pour une période spécifique aurait nécessité l’élimination de certains indicateurs, réduisant la complétude du tableau des tendances. 

Troisièmement, les tendances globales ne tiennent pas compte des variations régionales, expliquant pourquoi certains indicateurs peuvent ne pas toujours refléter la réalité locale, comme c’est le cas de l’étalement urbain et des difficultés liées à la crise du logement. Le dévoilement en 2024 des Indicateurs vitaux du Grand Montréal par la Communauté métropolitaine de Montréal et la Fondation du Grand Montréal, inspirés de la démarche du G15+ et de ses partenaires, contribuera à décliner les Indicateurs du bien-être au Québec à l’échelle des politiques publiques régionales, et devrait servir d’inspiration à d’autres décideurs publics.

Certaines régions peuvent présenter des disparités, par exemple en termes de qualité de l’air ou de taux de pauvreté. L’agrégation des données fournit une vision d’ensemble, mais ne capture pas la diversité régionale. Il est donc essentiel de collaborer avec des experts et les autorités gouvernementales pour améliorer la mesure et le suivi des indicateurs, afin de mieux représenter la réalité vécue par toutes les composantes de la population.

Enfin, il aurait été souhaitable de comparer certains indicateurs essentiels à des cibles gouvernementales prédéterminées pour évaluer les progrès. Parmi les indicateurs analysés, seules les cibles d'émissions de GES et du pourcentage d’aires protégées apparaissent dans cette présente analyse. Les cibles du volume de matières résiduelles éliminées, du volume d'eau potable consommée, du nombre de déplacements effectués en auto-solo et de l’accès et du niveau de services en mobilité durable ont été gardées à l’esprit au moment de l’analyse des résultats.