Faits saillants
Dans l’ensemble, le Québec a enregistré une tendance positive au sein des trois piliers, soit l’économie, la société et l’environnement.
Cette progression globale du Québec dans les trois piliers dépasse celle de l’Ontario et du Canada.
Le Québec a connu une progression notable de ses piliers économique et sociétal, en raison notamment d’un revenu disponible plus élevé, d’un marché du travail plus accessible et efficace, ainsi que d’une amélioration au chapitre de la pauvreté et des inégalités. En revanche, que ce soit au Québec, en Ontario et au Canada, le pilier environnemental demeure préoccupant par rapport aux défis que nous pose la lutte aux changements climatiques.
Le Québec, l’Ontario et le Canada connaissent encore un déficit de données sociales et environnementales.
Introduction
Le projet des Indicateurs du bien-être au Québec repose sur le constat désormais bien établi que le Produit intérieur brut (PIB) est un indicateur trop étroit et trop restrictif pour évaluer à lui seul le bien-être collectif des Québécoises et des Québécois et l’interdépendance des facteurs économiques, sociétaux et environnementaux. Dresser un portrait plus complet de notre bien-être collectif requiert de recourir à un éventail plus large d’indicateurs. Grâce à cet éclairage, les Indicateurs du bien-être au Québec ont pour objectif d’aider nos décideurs publics à élaborer des politiques publiques au service d’un véritable développement économique inclusif et durable.
Constats globaux
Dans l’ensemble, le bien-être au Québec semble avoir progressé au cours des dernières décennies, principalement grâce à l’évolution favorable des piliers économique et sociétal. L’augmentation du revenu par habitant et un marché du travail plus accessible sont à l’origine de cette amélioration, de même qu’une amélioration au chapitre de la pauvreté et un amenuisement apparent des inégalités.
En revanche, le bilan est moins reluisant au chapitre du pilier environnemental. Les tendances des indicateurs environnementaux suggèrent généralement une stagnation, voire une détérioration de la qualité de notre environnement. Dans plusieurs cas, le Québec reste encore bien loin des cibles gouvernementales, notamment en ce qui a trait à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 1990 et 2020. De plus, le déficit majeur de données environnementales implique la présence d’indicateurs orphelins, limitant notre capacité à réaliser un diagnostic complet et robuste à la prise de décisions. À titre d’exemple, les plus récentes données scientifiques révèlent un déclin accéléré des espèces et de la biodiversité [1] à un phénomène qui n’épargne pas le Québec (Commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada, 2018 ; Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, 2022). Or, le manque de données et d’indicateurs sur la biodiversité pour le Québec ne nous permet pas d’évaluer la situation de manière précise et d’agir rapidement en conséquence. Globalement, le Québec a un énorme chemin à parcourir s’il veut améliorer son bilan au chapitre environnemental.
[1] Rosenberg et al. (2019). Decline of the North American Avifauna. Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat [GIEC] (2002). Climate Change and Biodiversity. Dasgupta (2021). The Economics of Biodiversity: The Dasgupta Review.
Méthodologie
Cette synthèse identifie les grands constats qui se dégagent de données remontant parfois au milieu des années 1970 et allant parfois jusqu’en 2022. Cette seconde édition bonifie grandement le diagnostic initial des Indicateurs du bien-être au Québec qui se limitait aux années 2015 à 2019. Nous comparons désormais les tendances québécoises à celles de l’Ontario et à l’ensemble du Canada. Enfin, trois nouveaux indicateurs culturels ont été intégrés à l’analyse, un élément majeur de notre qualité de vie au Québec, amenant dorénavant le nombre total d’indicateurs chiffrés à 54 et le nombre total d’indicateurs orphelins à 18.
L’échantillon des données étant maintenant plus récent, nous pouvons également, mieux évaluer les effets de la pandémie de COVID-19 sur les piliers économiques, sociétaux et environnementaux au Québec, en plus de donner davantage de perspective au niveau des tendances lourdes.
Afin d’évaluer les grandes tendances des trois piliers, l’ensemble des données disponibles pour chaque indicateur ont été analysées. Les tendances représentent ainsi la progression des différents indicateurs dans le temps. Plusieurs facteurs influencent l’analyse de la progression d’un indicateur en particulier, dont l’étendue des données disponibles, la variation sur l’ensemble de la période, le taux de croissance annuel moyen ainsi que le jugement contextuel. L’analyse combinée de tous ces facteurs permet ainsi de déterminer si un indicateur s’est amélioré, détérioré ou est demeuré inchangé dans le temps.
Ce processus, qui est spécifique à chaque indicateur, a été effectué pour les 54 indicateurs chiffrés, pour chaque juridiction, permettant une analyse approfondie pour le Québec ainsi qu’une analyse comparative avec l’Ontario et l’ensemble du Canada [2]. Il est donc impossible de mettre des barèmes chiffrés homogènes pour déterminer si un indicateur s’est amélioré, détérioré ou est resté inchangé, car les conditions d’analyse changent d’un indicateur à l’autre. Cette approche pragmatique a été retenue dans l’optique d’inclure tous les indicateurs dans l’analyse, car l’imposition d’une période d’analyse uniforme aurait forcé l’exclusion de plusieurs indicateurs n’ayant pas de données pour la période choisie.
[2] En janvier 2022, la première édition des Indicateurs se concentrait sur le Québec, pour la période 2015-2019. L’échantillon théorique sur lequel repose les grandes tendances présentées ici est beaucoup plus étendu et comprend une comparaison avec l’Ontario et le Canada. Dans certains cas, il n’a pas été possible de garder exactement les mêmes indicateurs ou sources que dans la première phase du projet. En effet, afin d’avoir les indicateurs les plus uniformes possibles, Statistique Canada a été une source privilégiée afin de récolter les données nécessaires, par souci d’homogénéité.
Cette illustration met en lumière le progrès relativement inégal des indicateurs de bien-être économique (en rouge), sociétal (en mauve) et environnemental (en vert), au Québec, en Ontario et au Canada (de gauche à droite). Elle ne présume en rien du niveau absolu de progrès du bien-être au Québec. L'état de la progression de chaque pilier est représenté par la superficie rouge, mauve ou verte. En théorie, si une superficie colorée est petite, le nombre d'indicateurs de ce pilier ayant progressé est faible. Au contraire, si cette superficie colorée est grande, le nombre d'indicateurs de ce pilier ayant progressé est élevé. En d'autres mots, si la superficie colorée atteignait la bande blanche entourant le cercle, 100% des indicateurs de ce pilier auraient progressé.
Tendances globales
Économie | |||
---|---|---|---|
↗︎Ontario | ↗︎Canada | ||
Société | |||
↗︎Québec | ↗︎Ontario | ↗︎Canada | |
Environnement | |||
↘︎Québec | ↘︎Ontario | ↘︎Canada |
Analyse du Québec
Économie
L’analyse des indicateurs économiques suggère que le Québec a connu une amélioration marquée au chapitre de la conjoncture économique. Ces indicateurs, dont certains remontent à 1976, se sont globalement améliorés jusqu’en 2021. En effet, des 17 indicateurs économiques retenus, 11 ont connu une nette amélioration, 4 sont demeurés stables ou inchangés et 2 se sont détériorés. Dans le pilier économique, aucun indicateur ne comporte de donnée unique.
L’augmentation notable du revenu disponible par personne, un marché de l’emploi plus dynamique, une main-d’œuvre plus qualifiée et plus éduquée ainsi qu’une productivité du travail légèrement accrue, ont représenté les principaux vecteurs d’amélioration de la situation économique québécoise ces dernières décennies.
Des gains s’observent notamment au niveau des indicateurs économiques traditionnels : le revenu disponible s’est amélioré d’environ 67 % entre 1981 et 2020 (taux de croissance moyen annualisé de 1,3 %), le taux d’emploi a crû d’environ 30 % entre 1976 et 2021 (taux de croissance moyen annualisé de 0,6 %), ou encore le PIB réel par habitant a augmenté d’environ 60 % sur la même période (taux de croissance moyen annualisé de 1,2 %).
En outre, la situation sur le marché de l’emploi et de la qualification des travailleurs a également contribué de façon importante au bilan enviable du pilier économique. Le Québec a connu une diminution importante du travail involontaire à temps partiel (une baisse de 2,8 points de pourcentage entre 1997 et 2021) ainsi qu’un déclin notable de la proportion des jeunes de 15 à 24 ans qui ne sont ni aux études, ni à l’emploi, ni en formation (une diminution de 13 points de pourcentage entre 1976 et 2021), laissant sous-entendre que le marché du travail a évolué dans le sens d’une meilleure utilisation de ses ressources. Malgré l’amélioration globale du marché de l’emploi, les tendances démontrent cependant que le Québec est confronté à un bouleversement de son marché du travail, qui s’explique par une diminution de la main-d’œuvre disponible.
Malgré l’amélioration de l’accessibilité au marché de l’emploi observée grâce aux données, ce constat se doit d’être nuancé. Des progrès restent à faire afin de mieux intégrer les groupes plus vulnérables et marginalisés, ce qui pourrait permettre de réduire la pauvreté et les inégalités économiques. Il est également important de noter qu’un nombre important de postes vacants prévaut au Québec en raison du vieillissement démographique. Ce taux élevé de postes vacants pourrait à l’avenir affecter l’activité économique.
Au chapitre de l’éducation et de la formation, la proportion de la population de 25 ans et plus détenant au moins un diplôme d’études secondaires a augmenté d’environ 29 points de pourcentage entre 1990 et 2021, soit une augmentation de 1,4 % par année, ce qui porte à penser que la population québécoise est de plus en plus éduquée. De plus, entre 1997 et 2021, on constate une amélioration dans la qualité de la main-d’œuvre québécoise. Celle-ci, qui était à 43,5 % de qualité « faible » en 1997, est aujourd’hui à 75 % de qualité « moyenne » et « forte », suggérant que notre économie s’est orientée de plus en plus vers des activités à plus forte valeur ajoutée.
En revanche, certains indicateurs qui se sont détériorés ou qui sont demeurés stables représentent des sources de préoccupation, surtout en matière d’endettement des ménages et du secteur public. Ainsi, on observe une stagnation de la dette des ménages en proportion du revenu à un niveau excédant 100 % entre 2010 et 2021. Cela signifie que l’endettement des ménages excède leur revenu annuel, les rendant plus vulnérables aux hausses des taux d’emprunt. On remarque également une croissance de plus de 7 points de pourcentage de l’endettement public du gouvernement du Québec entre 1997 et 2021, soit une augmentation de 0,8 % par année. En effet, le ratio de la dette nette au PIB du gouvernement du Québec atteignait 42,4 % du PIB en 2021.
Enfin, plusieurs indicateurs économiques restent à documenter afin de nous offrir une vision beaucoup plus complète de l’évolution de ce pilier. Par exemple, l’absence actuelle d’indicateurs sur le dynamisme de l’entrepreneuriat collectif et plus globalement de l’évolution du secteur de l’économie sociale au Québec — un vecteur important de l’innovation sociale — est un angle mort important de notre analyse.
Société
Les indicateurs sociétaux suggèrent que la population québécoise a connu une amélioration générale de ses conditions sociales depuis les premières années de collecte de données, dont certains indicateurs remontent à 1976. Sur les 22 indicateurs sociétaux analysés, 12 ont connu une nette amélioration, 5 sont demeurés stables ou inchangés, 3 n’ont qu’une seule donnée ne permettant pas d’évaluer leur progression et 2 se sont détériorés.
Cette amélioration des indicateurs sociétaux est tributaire de la diminution de la pauvreté et du déclin des inégalités de revenu, de genre et d’ethnicité. D’autres facteurs, tels que la réduction de la criminalité, l’augmentation de l’espérance de vie ainsi que la hausse du soutien aux organismes communautaires ont également été des facteurs explicatifs de cette évolution favorable.
De même, le recul de la proportion de la population sous le seuil de faible revenu, mesurée autant par la mesure du panier de consommation (MPC) que par la mesure de faible revenu (MFR-50), suggère une diminution de la pauvreté au sein de la société québécoise.
Du côté des inégalités de revenu, les deux indicateurs retenus, soit le coefficient de Gini et l’indice de Palma, se sont tous deux améliorés entre 1976 et 2020. Les écarts d’emploi et de salaires entre les hommes et les femmes se sont également rétrécis, mais demeurent toutefois notables. Enfin, le Québec connait une diminution de l’écart du taux d’emploi entre Autochtones et Allochtones tout comme une meilleure intégration économique des immigrants, ce qui suggère une diminution des inégalités entre les personnes nées au Canada et les nouveaux arrivants, ainsi qu’entre les Autochtones et les Allochtones.
Des sujets de préoccupation demeurent notamment au chapitre des sports et de la culture, l’accès au logement, de même que sur le plan de la santé mentale de la population.
En effet, la part du PIB attribuée à la culture et au sport a accusé une baisse entre 2010 et 2019. Pourtant, les avantages du sport, notamment sur la santé physique et mentale sont largement reconnus (Croix-Rouge, 2021 ; Québec, 2022). De la même façon, plusieurs études démontrent les bienfaits liés à la santé des citoyens qui pratiquent des activités, consomment ou participent à la vie artistique et culturelle.
En particulier, notons qu’aucune amélioration notable n’est relevée dans la proportion des emplois du domaine culturel ainsi que dans l’accès et la fréquentation des bibliothèques, qui sont pourtant considérés comme des lieux d’accès privilégiés à la culture[3].
Sur un plan plus positif, les données indiquent que les investissements par personne de la part des Conseils des arts pour le soutien aux organismes et aux artistes ont augmenté de plus de 300 % entre 1994 et 2021, passant d’environ 5 à 22 dollars sur une base par personne.
On peut donc en conclure que les trois indicateurs culturels susmentionnés brossent un portrait plutôt mitigé en ce qui a trait au niveau de soutien ou d’accès aux sphères culturelle et sportive.
Quant au taux d’inoccupation des logements, il a chuté au Québec entre 1990 et 2021, avec un creux en 2019. Cela traduit un accès plus difficile au logement, phénomène qui est habituellement ressenti davantage dans les grands centres urbains.
Toujours dans le contexte des indicateurs sociétaux, on observe une stagnation de la part des individus de 12 ans et plus qui perçoivent leur santé mentale comme étant bonne ou très bonne entre 2015 et 2020. Cette stagnation sur cinq ans laisse supposer que l’accès à des ressources pourrait être amélioré.
Malgré les 22 indicateurs du pilier sociétal, de nombreux indicateurs orphelins aux données absentes ou peu robustes restent à documenter dans l’optique de brosser un tableau plus complet et plus approfondi des conditions sociales au Québec. Certains indicateurs représenteraient des ajouts importants qui nous permettraient de mieux prendre le pouls de la vitalité de la société québécoise. Parmi ceux-ci, on compte la qualité du système de garde à l’enfance, le nombre de personnes en situation d’itinérance, la santé environnementale, l’engagement communautaire et bénévole, la MFR-60 (une mesure relative indicatrice du revenu nécessaire à la sortie de la pauvreté) ou encore la vitalité des langues autochtones.
Globalement, malgré la progression de plusieurs indicateurs sociétaux, cela ne signifie pas que la situation sociale est maintenant enviable au Québec. À titre d’exemple, malgré la hausse du soutien aux organismes communautaires entre 2007 et 2020, plusieurs sont dans une situation critique depuis la pandémie, liée à un sous-financement chronique de leurs activités, ne leur permettant pas de desservir leurs clientèles comme ils le souhaiteraient.
Environnement
Les Indicateurs du bien-être au Québec dressent un bilan peu favorable de l’état de notre environnement. Parmi les 15 indicateurs environnementaux analysés, seulement 4 ont montré une nette amélioration, 5 sont restés stables ou inchangés, 4 n’ont qu’une seule donnée ne permettant pas l’évaluation de leur progression et 2 se sont détériorés. Dans le contexte actuel de la lutte aux changements climatiques, du dépassement des limites planétaires, de l’effondrement de la biodiversité ainsi que des impacts humains non négligeables sur la quantité et la qualité de l’eau, la stagnation, voire la détérioration de plusieurs des indicateurs environnementaux, suggère un manque d’actions efficaces à ce chapitre. On ne peut que conclure qu’énormément de travail reste à faire.
Les 4 indicateurs ayant connu une amélioration englobent les thèmes de l’utilisation des terres et de l’eau. En effet, le pourcentage d’aires protégées au Québec a plus que quadruplé entre 2002 et 2021, pour atteindre 16,3 % en 2021. Une augmentation du territoire protégé nous renseigne sur la préservation de la biodiversité. Ces efforts doivent se poursuivre en se concentrant sur les écosystèmes d'importance particulière pour la biodiversité et ses contributions aux personnes, et ainsi contribuer aux efforts internationaux en vue de protéger 30 % des zones terrestres et marines d’ici 2030.
Le Québec accuse également une diminution de l’eau potable distribuée par personne d’environ 16 % depuis 2011, bien qu’une réduction additionnelle de 13 % sera nécessaire d’ici 2025 pour atteindre la cible québécoise. En outre, la proportion des ouvrages municipaux respectant les standards en matière d’assainissement des eaux usées a également augmenté, une tendance favorable pour réduire l’impact négatif de la pollution de nos eaux usées sur les milieux naturels.
Entre 1990 et 2021, la part des constructions individuelles parmi les mises en chantier s’est réduite de 33,5 %, probablement en raison des Plans métropolitains d’aménagement et de développement des communautés métropolitaines de Montréal et de Québec. Cette donnée semble traduire une densification urbaine[4] dans certaines régions. À l’inverse de la densification, l’étalement urbain nécessite de défricher de plus grands territoires, ce qui affecte la faune et la flore des territoires touchés. Cet indicateur ne permet toutefois pas de mesurer précisément la quantité de territoire artificialisé, ni d’évaluer les impacts de l’étalement urbain dans les régions où la pression de la croissance urbaine est la plus forte. La densité urbaine est par ailleurs une solution pour développer l’offre de logement, en particulier à proximité des emplois et services.
Contrairement aux constats relativement positifs des deux autres piliers, les résultats du pilier environnemental sont préoccupants. Par exemple, la qualité de l’air s’est détériorée et la réduction des émissions totales de GES depuis 1990 est marginale, malgré une diminution plus importante des émissions exprimées par personne. En plus de ses impacts directs et néfastes sur la santé et la sécurité des individus, le réchauffement climatique affecte indirectement la qualité de l’air.
En ce qui concerne les émissions de GES, le gouvernement du Québec a émis des cibles qui semblent difficiles à atteindre. Alors que le gouvernement du Québec visait une diminution de 20 % entre 1990 et 2020, la réduction entre 1990 et 2019 n’aura été que de 1,1 %. Ce chiffre se situe à 9,8 % entre 1990 et 2020, cette diminution étant grandement attribuable à la pandémie mondiale de COVID-19, et qui remontera très vraisemblablement en 2021, une fois les données officielles publiées. Le Québec aura donc fort à faire pour accélérer le rythme de réduction de l’empreinte carbone sur son territoire et pour atteindre sa cible de 2030, soit une diminution de 37,5 % des émissions de GES à partir du niveau de 1990.
Un autre sujet de préoccupation a trait à la mobilité durable. En effet, alors que le Québec cible une réduction de 37,5 % de ses émissions de GES dans le secteur des transports d’ici 2030 et une diminution de 20 % de la part des déplacements effectués en auto solo d’ici 2030 par rapport à 2011, le nombre de véhicules sur les routes québécoises n’a cessé d’augmenter, de 44,2 % entre 1999 et 2019.
Cette augmentation du nombre de véhicules se traduit par davantage d’émissions de GES et n’est pas compatible avec une société carboneutre basée sur la sobriété énergétique en transports (GIEC, 2022). De plus, le nombre de véhicules par personne au Québec a augmenté pour se situer à 1,05 véhicule immatriculé par personne en 2019, chiffre qui se situait à 0,84 en 1999. Un ratio supérieur à 1 véhicule par personne est préoccupant, sachant qu’une certaine proportion de la population ne conduit pas et ne peut donc pas être propriétaire d’un véhicule immatriculé. En outre, le gouvernement du Québec vise à augmenter son offre de services dans le transport collectif de 5 % par année entre 2018 et 2023 (Politique de mobilité durable, 2030) et à rééquilibrer les investissements routiers et en transport collectif (Plan pour une économie verte 2030). L’indicateur pour le transport collectif, soit le nombre d’autobus par personne, n’a pas connu de variation notable entre 1999 et 2019, laissant sous-entendre qu’il y a place à l’amélioration dans ce secteur.
Des trois piliers, c’est certainement le pilier environnemental pour lequel des indicateurs font cruellement défaut, par manque de données robustes et fréquentes. En effet, des données chronologiques sur plusieurs années sont rares, ce qui rend la recherche d’indicateurs environnementaux encore plus difficile que celle des autres piliers[5]. Entre autres, il manque des indicateurs robustes sur la capacité de séquestration du carbone, le nombre des catastrophes naturelles et urgences, l’adaptation aux changements climatiques, la part modale des modes de mobilité durable, le niveau d’artificialisation des sols, l’évolution des écosystèmes et de la biodiversité. Ces indicateurs sont indispensables pour une meilleure compréhension et prise en compte de la situation environnementale québécoise dans les politiques publiques.
[3] Selon le tout premier rapport du programme BiblioQUALITÉ publié en 2022, les bibliothèques du Québec reçoivent une note globale de 66 % en ce qui a trait aux dépenses d’acquisition, aux heures d’ouverture, à la superficie, aux ressources humaines et aux places assises.
[4] En l'absence de la mise en place d'un indice d’artificialisation des sols, cet indicateur est intéressant, mais incomplet.
[5] En guise d’exemple, l’indice de circularité pour le Québec n’est disponible que pour une seule année, 2018.
Tendances détaillées - 3 piliers et total
En vert: amélioration / En rouge: détérioration / En gris: stabilité ou changement qui n'est pas notable (n'inclut pas le nombre d'indicateurs à donnée unique)
Économie | |||
---|---|---|---|
↗︎11Québec | ↗︎9Ontario | ↗︎9Canada | |
↘︎2Québec | ↘︎3Ontario | ↘︎1Canada | |
4Québec | 5Ontario | 7Canada | |
Société | |||
↗︎12Québec | ↗︎8Ontario | ↗︎9Canada | |
↘︎1Québec | ↘︎3Ontario | ↘︎2Canada | |
5Québec | 6Ontario | 7Canada | |
Environnement | |||
↗︎4Québec | ↗︎4Ontario | ↗︎4Canada | |
↘︎2Québec | ↘︎3Ontario | ↘︎5Canada | |
5Québec | 3Ontario | 2Canada | |
Total | |||
↗︎27Québec | ↗︎22Ontario | ↗︎22Canada | |
↘︎5Québec | ↘︎9Ontario | ↘︎8Canada | |
14Québec | 14Ontario | 16Canada |
Analyse comparative du Québec, de l’Ontario et du Canada
Cette partie de l’analyse vise à comparer le progrès des indicateurs entre le Québec, l’Ontario et l’ensemble du Canada. Elle ne porte pas de jugement sur le niveau absolu des progrès ou des déclins observés.
Économie
Le Québec se démarque du Canada et de l’Ontario pour le nombre d’indicateurs économiques s’étant améliorés. Le Québec a vu une progression de 11 de ses 17 indicateurs, contre 9 pour l’Ontario et le Canada. En revanche, les trois juridictions ont globalement connu une nette amélioration de leur condition économique. Tout d’abord, le revenu par habitant et le PIB par habitant se sont grandement améliorés dans toutes les juridictions, dans un ordre de grandeur passablement similaire.
Tout comme le Québec, l’Ontario fait face à une augmentation de l’endettement, ses ratios d’endettements public du gouvernement ontarien et privé des ménages s’étant détériorés. Au contraire, le gouvernement du Canada a réussi à diminuer son ratio d’endettement public d’environ 18 points de pourcentage de 1997 à 2021, mais l’endettement des ménages reste relativement inchangé.
En ce qui a trait à l’emploi, le Québec est la seule juridiction qui a expérimenté une baisse du taux de chômage. Malgré certaines augmentations du taux, plus particulièrement lors des périodes de récession, le taux de chômage a diminué de 1,1 point de pourcentage entre 1976 et 2021 au Québec. Durant la même période, le taux d’emploi a connu une hausse importante de près de 19,5 points de pourcentage.
En comparaison, l’Ontario et le Canada, malgré des taux de chômage relativement bas, ont connu une hausse de ces derniers, soit une augmentation de 1,9 et 0,9 point de pourcentage respectivement. En ce qui concerne les taux d’emploi de l’Ontario et du Canada, la hausse n’a pas été aussi importante que celle observée au Québec.
Globalement, le Québec a enregistré une amélioration de la situation de son marché du travail, pendant que les deux autres juridictions ont vu leur marché du travail demeurer assez stable. Toutefois, les trois juridictions ont connu un renforcement au chapitre de la qualité de leur main-d’œuvre et dans la proportion de la population des 25 ans et plus détenant au moins un diplôme d’études secondaires. Ainsi, la main-d’œuvre semble plus impliquée dans des activités à plus haute valeur ajoutée nécessitant des employés qualifiés. En outre, il y a une baisse de la proportion de jeunes qui ne sont ni aux études, ni à l’emploi, ni en formation dans l’ensemble des juridictions. Les trois juridictions ont également connu une amélioration de leur productivité horaire, avec des taux de croissance annuels moyens de 1,1 % pour le Québec et l’Ontario et 1,2 % pour le Canada. Toutefois, puisque le Québec commençait à un niveau légèrement inférieur aux deux autres juridictions, l’écart de productivité s’est creusé. En effet, le Québec produisait 3,5 $ par heure de moins que l’Ontario en 1997 et 4,4 $ par heure de moins que le Canada. En 2021, ces chiffres se situent à 4,9 $ par heure et 7,0 $ par heure respectivement.
Société
Du côté sociétal, le Québec se démarque encore une fois parmi les trois juridictions étudiées. En effet, plus de la moitié des indicateurs sociétaux du Québec se sont améliorés, contre un peu moins de la moitié pour les indicateurs canadiens et un tiers pour les indicateurs ontariens.
Plusieurs indicateurs ont évolué de la même manière dans les trois juridictions. Tout d’abord, les inégalités au niveau de l’emploi, les écarts salariaux entre les hommes et les femmes ont été réduites dans les trois juridictions, tout comme la diminution de la criminalité, ainsi que l’amélioration de l’espérance de vie et de l’appui à la mission globale des organismes communautaires. Tout comme au Québec, on n’a pas observé de changement notoire au niveau de la proportion de la population estimant leur santé mentale bonne ou très bonne en Ontario ou au Canada.
Les zones de préoccupation diffèrent partiellement entre le Québec, l’Ontario et le Canada. Au Québec, le taux d’inoccupation des logements locatifs a chuté entre 1990 et 2021. Ce taux est resté sous le seuil critique de 3 %, malgré les variations interrégionales. En comparaison, le taux d’inoccupation est demeuré relativement inchangé au Canada et a augmenté en Ontario. Toutefois, les taux d’inoccupation sont très bas dans les trois juridictions, bien qu’il soit sous la barre des 3 % pour le Québec. Cela laisse supposer un accès au logement difficile dans les trois juridictions. Cet accès au logement est particulièrement difficile pour les ménages défavorisés. Au-delà du taux d’inoccupation, qui reflète la rareté des logements, les gouvernements prenne de plus en plus acte d’une crise de l’accessibilité à un coût raisonnable en habitation, ce qui affecte l’ensemble des ménages. Par ailleurs, contrairement au Québec, les inégalités de revenu se sont aggravées en Ontario tout en demeurant stables dans l’ensemble du Canada.
Le système de financement des arts et de la culture du Québec fait ses preuves en se démarquant par des investissements trois fois plus importants qu’au Canada et quatre fois plus qu’en Ontario. Cela peut être expliqué par la synergie entre les paliers provincial et municipal dans le cadre des ententes de développement culturel, via les sociétés d’État et les conseils des arts, qui sont garante d’un accès aux œuvres pour un nombre en hausse continue de Québécois et Québécoises.
Environnement
En ce qui concerne les tendances environnementales, ces dernières sont très similaires d’une juridiction à l’autre. En effet, les trois juridictions étudiées comptent chacune 4 indicateurs s’étant améliorés, dont trois en commun, soit le pourcentage d’aires protégées, la distribution d’eau potable et la densification urbaine. Le quatrième indicateur s’étant amélioré est le respect des standards d’assainissement des ouvrages municipaux pour le Québec, l’accès à un parc ou un espace vert pour l’Ontario et le PIB vert pour le Canada. Les sujets de préoccupation dans les deux autres juridictions restent toutefois les mêmes que celles mentionnées pour le Québec, soit la mauvaise qualité de l’air et la mobilité durable, qui ne semblent pas s’améliorer au sein des trois juridictions. La biodiversité est une autre zone de préoccupation en Ontario et au Canada, mais l’absence de données équivalentes au Québec rend impossible tout exercice de comparaison.
Tout comme le Québec, l’Ontario peine à réduire ses émissions de GES, tandis que le Canada a augmenté les siennes de 13 % entre 1990 et 2020. Malgré la diminution des émissions par personne et par dollar du PIB dans les trois juridictions, le niveau global des émissions de GES reste élevé, ce qui mine l’effort de lutte aux changements climatiques. En outre, la qualité de l’air des trois juridictions s’est détériorée entre 24 et 35 % sur vingt ans, ce qui implique des effets néfastes sur la santé de la population.
La mobilité durable est un autre enjeu qui semble affecter toutes les juridictions. En effet, le nombre de véhicules présents sur les routes ainsi que le ratio de véhicules par personne ont augmenté, générant donc davantage d’émissions de GES.
Enfin, la biodiversité semble également être un sujet de préoccupation en Ontario et au Canada. On peut estimer que la tendance est généralement omniprésente, mais le manque de données équivalentes pour le Québec nous empêche d’établir un constat définitif. En effet, le nombre d’espèces menacées et vulnérables a fait un bond de 34 % en Ontario entre 2008 et 2018 et de 31 % entre 1970 et 2016 au Canada. La destruction des milieux naturels terrestres et marins ainsi que la pollution agricole, industrielle et résidentielle sont des facteurs pouvant expliquer ces résultats (IPBES, 2021 ; Chaire de recherche du Canada en économie écologique de l’Université du Québec en Outaouais, 2020). On peut penser que la situation n’est guère différente dans le cas du Québec.
Un mot sur la COVID-19
L’inclusion de données plus récentes permet de commencer à prendre le pouls de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les Indicateurs du bien-être au Québec. En 2020 et 2021, certains phénomènes ont été observés au niveau des tendances. Si certaines de ces conséquences ont été négatives, d’autres ont été positives.
Le pilier économique est probablement celui qui a subi l’effet négatif le plus marqué au Québec pendant la crise sanitaire. En effet, durant cette période, on a observé une augmentation du taux de chômage attribuable aux fermetures de différents secteurs jugés non essentiels. Le taux de sous-utilisation de la main-d’œuvre a également bondi entre 2019 et 2020, ce qui est encore une fois attribuable au ralentissement des différents secteurs d’activité économique en 2020. Ces indicateurs sont cependant redevenus positifs en 2021.
Le pilier social semble avoir connu une amélioration pendant la pandémie, selon les indicateurs analysés. À titre d’exemple, les inégalités ou encore les taux de pauvreté ont enregistré leur plus forte baisse depuis 20 ans durant les années 2020 et 2021. Cette réduction des inégalités et de la précarité peut être en bonne partie expliquée par le soutien massif apporté par les gouvernements lors de la pandémie.
Bien que ces développements apparaissent positifs, il est important de se rappeler que de nombreux individus ont perdu leur emploi pendant la pandémie et que leurs revenus ont été soutenus par l’aide d’urgence gouvernementale afin de subvenir à leurs besoins de base.
Du côté environnemental, certaines tendances ont été affectées positivement. Les émissions de GES, par exemple, ont diminué et la part de l’énergie consommée attribuable à l’énergie renouvelable s’est également accrue. Cela est dû en grande partie à la réduction des déplacements au niveau des transports. Cette accalmie au niveau des émissions de GES n’a toutefois été que de courte durée puisque la tendance à la hausse des émissions de GES a repris de plus belle en 2021.
Limites
Bien que l’analyse des tendances globales brosse un portrait de l’état du bien-être québécois, certaines limites doivent être prises en considération lors de l’interprétation des résultats.
Tout d’abord, la taille de l’échantillon de certaines données temporelles reste limitée, ce qui explique la présence d’indicateurs dont l’échantillon est limité à quelques données ou pour lesquels il manque des données. Ce déficit de données ne permet donc pas de faire une analyse aussi exhaustive que souhaité du bien-être québécois, en particulier sur le plan social et environnemental.
En deuxième lieu, l’analyse des tendances globales ne repose pas sur un échantillon fixe, l’objectif étant d’exclure le moins d’indicateurs possible. Le fait de choisir une période spécifique nous aurait contraints à éliminer certains indicateurs, rendant le tableau des tendances lourdes moins complet.
Les tendances globales ne prennent pas non plus en compte les effets régionaux plus granulaires, ce qui pourrait expliquer pourquoi certains indicateurs ne semblent peut-être pas toujours concorder avec la réalité vécue sur le terrain, tels que l’état de l’étalement urbain et les difficultés en matière d’accès au logement. Certaines régions, par exemple, sont aux prises avec une moins bonne qualité de l’air ou un plus haut taux de pauvreté, tandis que d’autres vivent le contraire. L’agrégation des données fournit une vision d’ensemble, et non pas la diversité des régions. Il convient de travailler conjointement avec les experts des différents domaines ainsi qu’avec les autorités gouvernementales afin d’améliorer la mesure et le suivi des indicateurs pertinents dans l’optique de mieux décrire la réalité vécue par tous les Québécois et Québécoises.
En dernier lieu, il aurait été souhaitable de comparer certains indicateurs particulièrement importants à des cibles préalablement fixées par les autorités gouvernementales. Cette comparaison aurait permis de mesurer le progrès de manière plus officielle, à savoir si le Québec s’approche ou non d’une cible, ou encore si celle-ci a été dépassée. Parmi les indicateurs examinés dans la présente analyse, seules les cibles d’émissions de GES, du pourcentage d’aires protégées, du volume de matières résiduelles éliminées, du volume d’eau potable consommée, du nombre de déplacements effectués en auto-solo et de l’accès et du niveau de services en mobilité durable ont pu être utilisées dans l’analyse des résultats.
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